Je fête mes 13 ans d'expatriation !

Si on m'avait dit un jour que je partirais de France aussi longtemps, je vous assure que je ne l'aurais jamais cru ! Et pourtant, ce mois-ci, cela fera 13 ans que, les larmes aux yeux et la boule au ventre, je me suis envolée vers Houston avec mon mari et ma fille de seulement un an pour démarrer une nouvelle vie. La raison de ce changement immense était simple : mon mari ne pouvait pas trouver de travail dans la ville où je vivais et il devait donc partir du lundi matin au jeudi soir alors que nous venions tout juste d’avoir un bébé. Houston était l’unique option qui nous permettait de vivre de nouveau ensemble, malgré mon manque de motivation de m’expatrier dans une ville que je connaissais déjà et pour laquelle j’avais clamé haut et fort deux ans auparavant : « Vivre à Houston ?! Moi ? Jamais ! »

Lorsque j’ai posé le pied au Texas en août 2011, je me souviens qu’on m’a dit : « À Houston, tu pleures deux fois : quand tu arrives et quand tu repars ». Si je ne savais pas encore quelle serait ma réaction lorsque je partirais, je peux vous assurer que j’ai bel et bien pleuré la première année, et un sacré paquet de fois, même ! Pour être tout à fait honnête, ce n’est pas la ville en elle-même qui m’a tant fait pleurer, mais l’éloignement avec ma famille, et il a fallu de nombreuses années pour que je trouve un certain apaisement à ce propos.

Malgré toutes les difficultés qui se sont dressées sur mon chemin, je peux désormais affirmer que m'expatrier aussi longtemps a été une des expériences les plus formatrices de ma vie. À deux occasions, je me suis retrouvée à partir vivre à plus de 8000 kms, sans maison, sans voiture, sans compte en banque, sans personne d'autre que ma petite famille de 4, afin de tout reconstruire. Je sais désormais que c'est possible de débarquer sans rien dans un pays dont on ne parle pas la langue et dont on ne connait pas les codes, et de s'en sortir quand même avec du travail, de la patience et de la confiance en soi. Je suis certaine d'ailleurs que c'est grâce à cette expérience d'expatriation que je suis parvenue à quitter l'Education Nationale pour repartir de zéro avec mes romans. Je savais que c'était possible, car j'avais déjà fait ce grand pas dans un autre domaine de ma vie.

À l'aéroport, en août 2018, juste avant de prendre l'avion pour partir vivre à Lisbonne !

Comme vous pouvez vous en douter, il y a eu un nombre incalculable de challenges à dépasser pendant mes 13 années d'expatriation. Aujourd'hui, j'ai envie de revenir avec vous sur deux événements qui m’ont particulièrement marquée lorsque je vivais à Houston : l’élection de Trump et le cyclone Harvey.

Pour l’élection de Trump, comment dire… J’étais tellement sous le choc la nuit qui a suivi les résultats que j’ai eu l’impression d’avoir une gueule de bois au réveil (le comble, pour moi qui ne boit pas une goutte d’alcool !). J’ai passé la journée dans le brouillard, sans parvenir à comprendre comment tant de personnes autour de moi avaient pu voter pour un idiot pareil. Au travail de mon mari, son chef a emmené des donuts pour fêter cette victoire… Tout le monde avait un grand sourire aux lèvres et moi je me suis vraiment demandée pour la première fois ce que je faisais là.

L’élection de Trump a certainement été le point de départ de notre réflexion sur un possible retour en Europe. J’ai profondément aimé le Texas, ses habitants et sa culture (sauf les armes, cela va sans dire), mais c’est à ce moment là que j’ai compris que l’écart avec les gens que je côtoyais au quotidien était trop grand. J’avais pu m’habituer à la nourriture excessive, au climat parfois violent, à la faune vraiment sauvage, à l’immense place de la religion et à la surconsommation (même si ça m’a beaucoup choquée), mais Trump… non. Quand je vois à l’heure actuelle qu’il est très bien positionné pour un second mandat, cela me fait peur, vous ne pouvez pas savoir… Espérons qu’on parvienne à éviter la gueule de bois cette fois-ci !

L'autre grand événement qui a ponctué ma vie d'expatriée, c'est quand le cyclone Harvey a frappé Houston fin août 2017. Cet ouragan, le plus puissant depuis 2005, a littéralement noyé la ville, qui a mis des mois à se remettre de ce passage traumatisant. Ma maison n'a pas été inondée, mais de nombreuses personnes autour de nous ont tout perdu. Clairement, c'est suite à cet événement, que nous ne souhaitions jamais revivre, que nous avons quitté les US. Certes, cela faisait un moment que nous nous posions la question d'un déménagement, mais c'est Harvey qui nous a mis sur les rails de notre nouvelle vie à Lisbonne.

Ci-dessous : Voilà à quoi a ressemblé Houston (dont notre quartier) pendant des mois... Je vous assure que même quand on fait partie des chanceux qui n'ont pas été directement touché, c'est assez traumatisant !

Il y aurait encore tant à dire sur ces 13 dernières années, entre la beauté de la vie au Portugal, la difficulté d'évoluer au quotidien dans un pays dont on ne parle pas la langue, les inévitables boulettes du fait de notre ignorance, la sensation d'être parfois seule au monde, la richesse de découvrir la différence, l'envie de s'intégrer au mieux dans un pays si différent du notre... Mais ce que j'ai surtout envie de partager avec vous, c'est qu'on est capable de s'adapter bien plus que ce qu'on peut imaginer à des situations qui nous impressionnent. Tant qu'il n'y a pas de danger réel, la peur n'est qu'une création de l'esprit qu'on peut apprendre à dépasser pour vivre pleinement ses rêves. En 13 ans, j'ai appris à prendre les problèmes les uns après les autres pour les résoudre, avec pour unique objectif de vivre ma vie tel que je l'entends. Croyez-moi, ça n'a pas été facile parfois et plus d'une fois j'ai failli baisser les bras pour rentrer en France, mais j'ai persisté, et j'ai sacrément bien fait... Car si je n'avais pas ravalé mes peurs en août 2011 pour partir vivre au bout du monde, je suis certaine que vous ne tiendriez pas mes romans entre vos mains aujourd'hui :-)

Sophie

PS : Si vous vous posez la question, OUI j'ai aussi pleuré en quittant Houston ^^!